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25 févr. 2010

Lucio Fontana 2/2


Dans le domaine social et moral ou spirituel, l’art n’a aucun devoir. Le seul devoir de l’artiste est de garder vivant le sentiment de l’humain dans la société.

De retour en Italie en 1947, Fontana continue aussi son activité de céramiste dans les ateliers Mazzotti, où il combine les travaux de commande et les formes plus abstraites. Il développe aussi des sculptures « spatiales » en plâtre peint qui évoquent des constellations ou des nébuleuses en spirales, à l’instar de la peinture futuriste, qui utilise souvent la spirale, l’enroulement et des « lignes » de vitesse.

Mais Fontana souhaite dépasser le futurisme, ce mouvement italien qui prône la vitesse, à travers l’interaction des formes, des rythmes et des couleurs cherche à exprimer une « sensation dynamique Fin 1947, Fontana lance le spatialisme, entouré par d’autres artistes, d’écrivains et de philosophes. En 1949, il innove en présentant son premier «milieu spatial » à la Galerie Del Naviglio à Milan. Pour la première fois, Fontana propose une installation totale : lumière violette, murs de la galerie peints en noir, agencement de formes cosmiques en papier mâché recouvert de vernis fluorescent, musique. C’est plus une unité artistique, un spectacle qu’une exposition classique, un univers de couleurs et de sons, avec ses formes primitives qui tranchent avec le modernisme de l’éclairage, pour mieux dire que la modernité ne peut se détacher de la racine humaine dont elle est le prolongement.», une simultanéité des états d'âme et des structures multiples du monde visible.


Mais Fontana doute de ce qu’il a mis en place « Le milieu spatial, c’est l’œuf de Colomb, trop fragile et trop difficile. J’ai parfois l’impression d’avoir pensé et fait quelque chose de supérieur à l’intelligence ou fou ou exalté » écrit-il à la suite de cette exposition. Mais Fontana créera d’autres « milieux spatiaux ». Il sera l’un des premiers sculpteurs à travailler sur la matière lumineuse. Avec le concours d’architectes et d’artisans, il réalise une sculpture en néon, une arabesque de tubes de néons longue de 100 m qui semble flotter dans l’espace, qui sera présentée à la triennale de Venise en 1951.

Certes l’idée avait déjà été évoquée par des photographes dans les années 20, mais le néon de Fontana ancre l’idée du spatialisme auprès du grand public, qui y voit là l’entrée du monde dans une ère nouvelle, alors que les premiers essais de la conquête spatiale commencent.

A l’occasion, Fontana publie le « Manifeste technique du spatialisme » où il vente les possibilités techniques des nouveaux matériaux en art, comme le béton, pour mieux souligner des formes nouvelles, abstraites mais inspirées par l’Univers, l’infiniment grand de l’espace ou l’infiniment petit de l’atome.


« Quand je travaille en tant que peintre sur un de mes tableaux perforés, je ne veux pas faire un tableau, je veux ouvrir un espace, créer pour l’art une nouvelle dimension, le rattacher au cosmos tel qu’il l’entend, infini au-delà de la surface plate de l’image ».
Fontana collabore avec des architectes d’intérieur et dessine des meubles, des lampes et des ornements de plafond en stuc. Le sculpteur ne fait pas de hiérarchie entre les arts, qu’ils soient libres, appliqués ou décoratifs. Toujours curieux, Fontana va étudier les possibilités du verre. Une série nommée
Barochi va mêler peinture à l’huile, paillettes, morceaux de verre pour refléter la lumière.

Après une courte période de doutes, Fontana va simplifier son art. En 1957, il fend une toile monochrome et crée une série de tagli. Il peint à la peinture latex la toile puis l’incise en plusieurs endroits. Après séchage, la toile se resserre et les bords de la fente se recourbent. Fontana l’élargissait en y insérant de la gaze noire. « J’essaye de représenter le vide. En acceptant l’idée d’infini, les hommes ont déjà accepté celle de néant. »

Mutilation de la toile, monochromie – on sait que Fontana avait été impressionné par les peintures de Klein -, les tagli remportent un succès auprès de la critique qui y voit un renouveau de l’art informel. Ces œuvres ont contribué à rendre célèbre le sculpteur dans le monde entier, et pour répondre à la demande du marché de l’art, Fontana en produira énormément, peut-être trop, laissant les journalistes commenter – certains y voient des allusions au sexe féminin, d’autres à une métaphore visuelle de l’inconscient, un aller retour entre le dedans et le dehors, un double mouvement entre l’idée et l’informe.


Mais Fontana sait se remettre en question. A partir des concepts de buchi et des tagli (les trous et les fentes), il explore d’autres matériaux, d’autres formats. Couleurs pâteuses et métalliques, verre coloré, céramique, plâtre servent des compositions de plus en plus élaborées qui évoquent des cratères, des blessures ou des orifices corporels effrangés.

Si Fontana est reconnu en Europe comme le chef de file de l’art informel, il ne reçoit pas l’accueil escompté aux Etats-Unis où, en ce début des années 60, le Pop Art figuratif est le courant dominant.

Il continue toutefois de réaliser d’étonnantes installations pour les galeries et renoue avec les sculptures au néon. Vers la fin de sa vie, il conçoit des petits théâtres, renouant avec un figuratif schématique plein d’humour : dans des caissons, des formes peintes en contreplaqué se détachent d’une toile lacérée. Les silhouettes en jettant des ombres sur la toile provoquent une spatialité. En 1967, il conçoit les décors abstraits et les costumes pour un ballet contemporain.

Fontana meurt le 7 septembre 1968.


Reconnu comme une valeur sure de l’art, exposé partout dans le monde, Fontana était aussi mécène et collectionneur d’art. Novateur, abolissant les frontières entre peinture et sculpture, il annonce tout le courant de l’art contemporain, qu’il soit conceptuel, informel ou minimal.

« L’art va devenir quelque chose de complètement différent. Ni un objet, ni une forme. Plus rien à voir avec la beauté attachée à un objet à vendre. L’art va devenir infini, immatériel, philosophique. »