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26 févr. 2010

Navajo 6/8


La mystérieuse voie du projectile

Nous l'avons dit, la médecine navajo considère l'ensemble de l'individu malade, et vise à restaurer un équilibre.
Le philosophe et médecin Georges Ganguilhem dans sa thèse de médecine en 1943, est l'un des premiers à concevoir une approche de la maladie assez différente des thèses en cours : "nous estimons que le pouvoir et la capacité de se rendre malade sont une caractéristique essentielle de la philosophie humaine". Une idée très "navajo".

La voie du Projectile est la racine et la clé de toutes les croyances navajos. Voie majeure, initiatrice, elle relie les puissances matérielles et spirituelles, le corps et l'esprit. On fait appel à cette cérémonie lorsqu'un individu a perdu le goût de vivre, ou lorsqu'il souffre physiquement de maux mystérieux que l'on appellerait "somatisation" dans la médecine occidentale. Elle se déroule sur 9 nuits, parfois seulement sur cinq, et comporte une branche masculine et une branche féminine. Elle a été décrite par des antropologues en 1922.

Femme-qui-change donna naissance aux deux Jumeaux, Tueur de Monstres conçu avec le Soleil et Né de l'Eau, conçu par la pluie. Les deux jumeaux ignorent leur filiation paternelle et se mettent en quête de la trouver, après des épreuves terribles. Le Soleil finalement les reconnait et leur fait cadeau de la médecine et des armes nécessaires pour débarasser la terre de ses monstres. Emerge alors le peuple des hommes médecines. Femme-qui-change, qui, sans cesse passe, de la jeunesse à la vieillesse reconquiert alors sa beauté et une éternelle jeunesse.

De nombreuses peintures de sable viennent illustrer à chaque épisode de la légende. Le rose, mélange du blanc de la paix et du rouge du danger est largement utilisé, pour signifier l'équilibre entre les différentes forces en présence. Le chanteur travaille dans le sens contraire à la course du soleil, comme pour retarder le temps, repousser les limites. Les peintures ne se bornent pas à illustrer. Certaines comportent des substances médicinales, et font la liaison entre le patient et son mal. Ici, les structures classiques des peintures sont trrangressées : l'arc en ciel protecteur est remplacé par des serpents, on y évoque des cycles de mort et de renaissance, par l'alternance des couleurs noires et roses.
Il s'agit ici plus que d'un soin, mais d'une sorte de traitement préventif général. Certains observateurs pensent que cette voie pourrait s'adresser aux capacités immunitaires menacées, ou même avant qu'elles ne le soient.

Rarement exécutée car elle demande une très grande maîtrise du chamane, la Voie de la Nuit n'a pas révélé tous ces mystères. On y vit, on y meurt, mais sans jamais perdre la capacité de guérir et de renaître à soi-même dans un état où l'équilibre sera restauré. Et les inversions et transgressions dans l'éxécution des peintures peuvent laisser supposer que cette cérémonie touche au mystère même de la vie.


Celui que l'on instruit je suis
Dieu qui parle, je suis
Que les pollens de l'aube, du crépuscule et du petit tourbillon de terre m'instruisent
Puissé-je marcher parle pollen de l'oiseau bleu, du ciel et rayon de soleil
Rendu à la beauté, puissé-je être sur le chemin de la connaissance.
(chant de Femme-Qui-Change)


Bibliographie
- G. Ganguilhen, le Normal et le pathologique aux PUF - 1979
Le texte "l'idée de guérison" a été publié dans La Nouvelle Revue de Psychanalyse - Paris, printemps 1978
- Michel Foucault, Naissance de la Clinique - Puf
Peintures de sables de Fred Stevens
- FJ Newcom : Hoosteen Klah aux éditions Le mail (le chant de Femme-Qui-Change).