Wikipedia

Résultats de recherche

Affichage des articles dont le libellé est Plasticiens. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Plasticiens. Afficher tous les articles

25 févr. 2010

Yves Klein, le temps et l'infini 1/2


"Un peintre doit peindre un chef d'oeuvre unique : lui-même, constamment, et devenir ainsi une sorte de pile atomique, une sorte de générateur à rayonnement constant qui imprègne l'atmosphère de toute sa présence picturale, fixée dans l'espace après son passage. C'est ça la peinture, la vraie, celle du 20ème siècle."

Complexe Yves Klein.
Celui qui allait conquérir la scène artistique internationale avec ses happenings, mettre au point une couleur désormais aussi classique que le rouge cadmimum ne faisait pas les choses par hasard ou par pur opportunisme.

Né le 28 avril 1928, Yves Klein passa son enfance entre Paris, Cagnes-Sur-Mer et les amis artistes de ses parents. Imprégnation précoce d'idées de liberté, de réflexions sur l'Art (le débat entre art abstrait et art figuratif est très actuel, il se lie d'une amitié durable avec celui qui allait devenir le sculpteur Arman.

Yves Klein ne suit pas des études dans une quelconque école d'art. La forme et la ligne ne le passionnent pas, il y voit une limitation de modes de pensées trop rigides. Klein privilégie la couleur, plus spirituelle, plus sensible. Imprégné de philosophie asiatique, sa pratique intensive du judo, et un séjour au Japon, on peut aussi voir dans l'oeuvre de Klein, minimale, un clin d'oeil à l'esthétique zen.

La couleur repésente donc quelque chose en elle-même dit Klein. Mais il recherche une couleur "pure". Après avoir travaillé sur une série de monochrome, l'artiste se trouve limité par la perte de luminosité du pigment due à son mélange avec les liants traditionnels de la peinture. La sensibilité propre de la couleur ne peut vibrer.
"Pour moi les couleurs sont des êtres vivants, des individus très évolués qui d'intègrent à nous, comme à un tout". Klein décide alors de travailler sur une seule couleur, le bleu, symbole du ciel, de l'horizon. ou de l'océan. Avec l'aide du chimiste Edouard Adam, il met au point un outremer saturé "la parfaite expression du bleu". Il peut ainsi travailler avec les liants classiques sans perte selon lui d'intensité. D'ailleurs, il travaillera désormais au rouleau, pour une meilleure uniformité de la couleur. Klein veut plonger le spectateur dans l'océan de son bleu. Il va donc privilégier les formats verticaux, accrocher ses toiles à 20 cm du mur, pour donner une liberté spatiale à l'oeuvre. Avec Klein, il n'y a plus de point à fixer, l'oeil du spectateur n'est pas distrait par une ligne, une forme, un détail.
Le bleu, couleur de l'esprit, de la paix intérieure rencontre la matière. Le physique rencontre le spirituel, le temps, l'infini.

Evidemment, dans les années 50, les toiles de Klein, qui l'on considère aujourd'hui comme des chefs d'oeuvre, sont choquantes. D'une part parce que le grand public reste perplexe, de l'autre parce que l'abstraction des années 50 reste axée sur la ligne. De plus, en brevetant l'IKB (l'international Klein Blue), Klein rompt avec la tradition qui sépare l'artiste du monde marchant. Certes, il voulait protéger son invention, mais également diffuser à l'international son pigment.
"On ne devient pas peintre, on découvre tout à coup que l'on l'est"

Contre toute attente, son exposition 'Proclamation de l'époque bleue" à la Galerie Apollinaire à Milan en 1957 est un succès. Le titre bien sur est un clin d'oeil à la période bleue d'un autre rénovateur de l'Art, Picasso (qui va déconstruire la forme et la ligne). Klein y expose 11 oeuvres absolument identiques mais propose des prix différents pour chaque. C'est le tabou de la valeur de l'oeuvre qui explose. L'exposition fut reprise à Paris, à Londres et à Dusseldorf, avec le même succès.
Klein s'amuse alors à repeindre des objets du quotidien de son bleu, assiette, globe, tapis bleu, voire même une Victoire de Samothrace bleue.

"L'art n'est plus une sorte d'inspiration qui vient de je ne sais quoi, qui marche au hasard et ne présente que l'extérieur pittoresque des choses. C'est la raison elle-même, mais suivant une marche nécessaire, et contenue par les lois supérieures".

à suivre.

Sophie Calle, Double Je


« Je tente de trouver des solutions pour moi-même, c'est ma thérapie personnelle. Le fait que ce soit de l'art me protège - l'art me donne le droit de faire ces choses ».

Ma première "rencontre" avec Sophie Calle s'est faite en 1998. En farfouillant dans le rayon Art d'une librairie bien connue, je tombe sur ce petit livre : Régimes Chromatiques où l'artiste - pour suivre l'héroine du roman de son ami Paul Auster se met à manger chaque jour des aliments d'une seule couleur.... Et photographie ses repas. Mais ne nous y trompons pas, il est peu probable que Sophie Calle se soit gavée pendant une semaine de vert, de rose, de jaune, de rouge.

Car de sa "vie" elle a fait son art. Nous sommes ici dans le domaine de l'auto-dérision, du conceptuel porté à son paroxysme et d'une bonne dose de provocation qui rend Sophie Calle si attachante, ou si dérangeante selon la sensibilité.

Tous les moyens sont bons = photographie, vidéos, écriture, installations, mais surtout un solide sens de la mise en scène qui en fait un personnage original, audacieux (la prem's à le faire).
Ainsi, elle se met à suivre des inconnus dans la rue et à les photographier "pour le plaisir" dit-elle. Elle demandera à sa mère quelques années plus tard d'engager un détective pour la faire suivre elle (la Filature), se fera embaucher dans un hotel à Venise comme femme de chambre pour photographier les poubelles et les lits défaits des occupants.
L'oeuvre qui la fait découvrir est un petit chef d'oeuvre d'humour noir = A ces aveugles de naissance elle demander : Quelle est votre vision de la beauté ? Quelle est votre vision de la monochromie ?.
Et ainsi de suite

Mettre en scène sa vie, celle des autres, se raconter et raconter, sans prétention pour celle qui ne se reconnait pas comme une artiste ("un heureux hasard"). Finalement le concept n'est pas si novateur - mais Sophie Calle pointe aussi avec une certaine malice les interstices de notre société.
Joueuse celle qui a représenté la France à la Biennale de Venise en 2007, 3 ans après une grande retrospective au Centre Beaubourg ? Pas forcément des jeux innocents, mais une mise en danger d'un soi qui est peut-être le notre. Sophie Calle s'autorise, sans apparentes limites ce que nous ne nous autorisons pas : ranger ses cadeaux d'anniversaire dans une bibliothèque sans les ouvrir, appeler au hasard la cabine téléphonique du pont Garigliano à Paris (donc s'appeler puisqu'elle a dessiné cette cabine), ou lors de Nuits Blanches, demander à ses visiteurs de la maintenir éveillé en lui racontant une histoire. Le jeu laisse sa place au hasard mais aussi à une certaine vision des rapports entre l'artiste, les autres, et l'oeuvre qui nait aussi des autres. Ainsi dans son dernier ouvrage "Prenez-soin de vous", elle fait lire un email de rupture à 107 femmes d'horizons divers qu'elle a fait photographier par JB Mondino.


Sophie Calle est née en 1953 à Paris, son père fut l'initiateur du Carré d'Art à Nimes. Elle dit elle même s'être engagée dans des activités artistiques "par jeu".

Bibliographie

- son dernier ouvrage "Prenez Soin de vous" aux éditions Actes Sud

- le catalogue de l'exposition "M'as-tu vue" aux éditions du Centre Pompidou

- "Doubles jeux, coffret reprenant ses principaux travaux, aux Editions Actes Sud.

- et enfin l'ouvrage de référence, aux PUF "Sophie Calle, l'Art caméléon" par Anne Sauvageot. L

Lucio Fontana 2/2


Dans le domaine social et moral ou spirituel, l’art n’a aucun devoir. Le seul devoir de l’artiste est de garder vivant le sentiment de l’humain dans la société.

De retour en Italie en 1947, Fontana continue aussi son activité de céramiste dans les ateliers Mazzotti, où il combine les travaux de commande et les formes plus abstraites. Il développe aussi des sculptures « spatiales » en plâtre peint qui évoquent des constellations ou des nébuleuses en spirales, à l’instar de la peinture futuriste, qui utilise souvent la spirale, l’enroulement et des « lignes » de vitesse.

Mais Fontana souhaite dépasser le futurisme, ce mouvement italien qui prône la vitesse, à travers l’interaction des formes, des rythmes et des couleurs cherche à exprimer une « sensation dynamique Fin 1947, Fontana lance le spatialisme, entouré par d’autres artistes, d’écrivains et de philosophes. En 1949, il innove en présentant son premier «milieu spatial » à la Galerie Del Naviglio à Milan. Pour la première fois, Fontana propose une installation totale : lumière violette, murs de la galerie peints en noir, agencement de formes cosmiques en papier mâché recouvert de vernis fluorescent, musique. C’est plus une unité artistique, un spectacle qu’une exposition classique, un univers de couleurs et de sons, avec ses formes primitives qui tranchent avec le modernisme de l’éclairage, pour mieux dire que la modernité ne peut se détacher de la racine humaine dont elle est le prolongement.», une simultanéité des états d'âme et des structures multiples du monde visible.


Mais Fontana doute de ce qu’il a mis en place « Le milieu spatial, c’est l’œuf de Colomb, trop fragile et trop difficile. J’ai parfois l’impression d’avoir pensé et fait quelque chose de supérieur à l’intelligence ou fou ou exalté » écrit-il à la suite de cette exposition. Mais Fontana créera d’autres « milieux spatiaux ». Il sera l’un des premiers sculpteurs à travailler sur la matière lumineuse. Avec le concours d’architectes et d’artisans, il réalise une sculpture en néon, une arabesque de tubes de néons longue de 100 m qui semble flotter dans l’espace, qui sera présentée à la triennale de Venise en 1951.

Certes l’idée avait déjà été évoquée par des photographes dans les années 20, mais le néon de Fontana ancre l’idée du spatialisme auprès du grand public, qui y voit là l’entrée du monde dans une ère nouvelle, alors que les premiers essais de la conquête spatiale commencent.

A l’occasion, Fontana publie le « Manifeste technique du spatialisme » où il vente les possibilités techniques des nouveaux matériaux en art, comme le béton, pour mieux souligner des formes nouvelles, abstraites mais inspirées par l’Univers, l’infiniment grand de l’espace ou l’infiniment petit de l’atome.


« Quand je travaille en tant que peintre sur un de mes tableaux perforés, je ne veux pas faire un tableau, je veux ouvrir un espace, créer pour l’art une nouvelle dimension, le rattacher au cosmos tel qu’il l’entend, infini au-delà de la surface plate de l’image ».
Fontana collabore avec des architectes d’intérieur et dessine des meubles, des lampes et des ornements de plafond en stuc. Le sculpteur ne fait pas de hiérarchie entre les arts, qu’ils soient libres, appliqués ou décoratifs. Toujours curieux, Fontana va étudier les possibilités du verre. Une série nommée
Barochi va mêler peinture à l’huile, paillettes, morceaux de verre pour refléter la lumière.

Après une courte période de doutes, Fontana va simplifier son art. En 1957, il fend une toile monochrome et crée une série de tagli. Il peint à la peinture latex la toile puis l’incise en plusieurs endroits. Après séchage, la toile se resserre et les bords de la fente se recourbent. Fontana l’élargissait en y insérant de la gaze noire. « J’essaye de représenter le vide. En acceptant l’idée d’infini, les hommes ont déjà accepté celle de néant. »

Mutilation de la toile, monochromie – on sait que Fontana avait été impressionné par les peintures de Klein -, les tagli remportent un succès auprès de la critique qui y voit un renouveau de l’art informel. Ces œuvres ont contribué à rendre célèbre le sculpteur dans le monde entier, et pour répondre à la demande du marché de l’art, Fontana en produira énormément, peut-être trop, laissant les journalistes commenter – certains y voient des allusions au sexe féminin, d’autres à une métaphore visuelle de l’inconscient, un aller retour entre le dedans et le dehors, un double mouvement entre l’idée et l’informe.


Mais Fontana sait se remettre en question. A partir des concepts de buchi et des tagli (les trous et les fentes), il explore d’autres matériaux, d’autres formats. Couleurs pâteuses et métalliques, verre coloré, céramique, plâtre servent des compositions de plus en plus élaborées qui évoquent des cratères, des blessures ou des orifices corporels effrangés.

Si Fontana est reconnu en Europe comme le chef de file de l’art informel, il ne reçoit pas l’accueil escompté aux Etats-Unis où, en ce début des années 60, le Pop Art figuratif est le courant dominant.

Il continue toutefois de réaliser d’étonnantes installations pour les galeries et renoue avec les sculptures au néon. Vers la fin de sa vie, il conçoit des petits théâtres, renouant avec un figuratif schématique plein d’humour : dans des caissons, des formes peintes en contreplaqué se détachent d’une toile lacérée. Les silhouettes en jettant des ombres sur la toile provoquent une spatialité. En 1967, il conçoit les décors abstraits et les costumes pour un ballet contemporain.

Fontana meurt le 7 septembre 1968.


Reconnu comme une valeur sure de l’art, exposé partout dans le monde, Fontana était aussi mécène et collectionneur d’art. Novateur, abolissant les frontières entre peinture et sculpture, il annonce tout le courant de l’art contemporain, qu’il soit conceptuel, informel ou minimal.

« L’art va devenir quelque chose de complètement différent. Ni un objet, ni une forme. Plus rien à voir avec la beauté attachée à un objet à vendre. L’art va devenir infini, immatériel, philosophique. »



Lucio Fontana 1/2


« Toutes les conceptions artistiques prennent leur source dans l’inconscient » - Manifesto Blanco.

Des toiles perforées ou lacérées d’une grande fente, telles sont les œuvres les plus connues du sculpteur Lucio Fontana. Ce qui peut sembler commun ou facile aujourd’hui ne l’était pas en 1949, quand les premiers Buchi (trous) ont commencé à être exposés. La toile ou la feuille de dessin perforée, repoussée, jette des ombres sur la surface du tableau et par là-même intègre l’espace réel dans l’œuvre d’art. On peut aussi parler d’un travail sur le vide, qui inspirera l’art minimal.


Rien ne prédispose Lucio Fontana a devenir le créateur du spatialisme et l’une des figures marquantes de l’art de la seconde partie du 20ième siècle.

Il est né le 19 février 1899 en Argentine. Son père, émigré italien, est sculpteur de monuments et de sculptures funéraires. Envoyé faire ses études en Italie, il suit les cours de l’école du bâtiment à Milan, et obtient un diplôme d’ingénieur en 1918. Il travaille deux ans dans l’atelier de son père, et décide de continuer sa formation par un cursus à l’Académie des Beaux-Arts de Milan. Il retourne en Argentine en 1923 et ouvre son propre atelier en 1924.

Si l’importation de marbre de carrare et l’invention de Fontana lui assurent un succès matériel, il ne souhaite pas rester artisan.

Il repart à Milan suivre des cours de sculpture auprès d’Adolfo Wildt, le grand maître du marbre. Il obtient son diplôme en 1930, il a 31 ans. Si Wildt voit en lui son successeur, Fontana souhaite explorer d’autres pistes et d’autres formes. Ses premières sculptures, en plâtre a des volumes massifs et grossiers et se rapproche d’un primitivisme que Fontana va explorer dans une série de bas-reliefs.


Fontana a hésité longtemps peinture et sculpture. « J’aurai aimé être un bon peintre comme mon grand-père, mais je sens un artiste spatial » écrit-il. Mais c’est la rencontre avec des artistes du mouvement « Abstraction-création » qui vont lui faire prendre un autre parcours. Il adhère au mouvement (fondé en 1931 à Paris) et exposera régulièrement avec eux.

Parallèlement, Fontana s’intéresse aux techniques de la terre cuite et de la mosaïque qu’il détourne de sa vocation décorative pour en recouvrir la tête sculptée de sa femme. Il doit aussi se défendre contre les préjugés : « je suis un sculpteur, pas un céramiste » dit-il en 1939.


De 1937 à 1940, Fontana doit se plier aux conditions de la dictature fasciste. Le régime soutient la création artistique quelle que soit sa tendance pour éviter une résistance intellectuelle. Cela lui permet de participer à l’exposition universelle de 1937 et de faire un stage à la manufacture de Sèvres. Mais en 1940, il repart pour l’Argentine où il vivra jusqu’en 1947. Il espère y implanter un mouvement d’art moderne et, s’il se contente d’un travail classique pour assurer sa vie matérielle, il fonde à Buenos Aires, une école d’art « Altamira » où il enseigne la sculpture. Regroupant des artistes divers, organisant des expositions, Altamira se veut non seulement un centre créatif mais une école de pensée, tournée vers les possibilités nouvelles de l’Art.

En 1946, Fontana et ses étudiants rédigent le premier Manifesto Blanco, qui prône l’utilisation de technologies inédites en sculptures mais aussi un allègement de la forme que l’on peut traduire dans un primitivisme inspiré de la nature.

Hélas, le Manifesto blanco ne rencontre pas un grand succès dans une Argentine qui vient de porter au pouvoir Péron. En 1947, Fontana quitte l’Argentine pour revenir en Italie.


Les œuvres que Fontana avaient laissées dans son atelier de Milan ont été détruites par les bombardements alliés. Quelques œuvres ont pu subsister grâce à des collectionneurs, mais pour Fontana, c’était un nouveau départ.

Avec ses premières toiles trouées, Fontana séduit la critique qui voit en lui le peintre de l’après-guerre, et le début d’un art nouveau. Fontana, tirant les leçons du passé proche, écrit en 1949 : « L’art ne se développe pas, car si c’était le cas, l’art grec ou l’art de la Renaissance auraient suffit pour mener l’homme à la perfection. En vérité, l’Art servait et sert de propagande. A chaque idéal son arc de triomphe, des monuments pour les généraux et les héros. De la propagande réalisée par des artistes, que l’on nous présente comme œuvre d’art. Si chaque artiste était toutefois stimulé par la beauté d’un art purement abstrait, cela servirait le bien de la communauté.


Claude Cahun, l'héroïne singulière


Inclassable Claude Cahun !
Photographe, écrivain, comédienne,elle affiche une personnalité peu conventionnelle, et ouvre des portes créatives inédites. Peu connue du grand public, on redécouvre aujoud'hui son oeuvre, et ses inventions photographiques, à une époque où l'ordinateur et les appareils numériques relevaient de la science-fiction.

De son vrai nom Lucy Renée Mathilde Schwob, elle nait en 1894 à Nantes, dans un milieu littéraire. Son père, Maurice Schwob est le propriétaire du journal "Le phare de la loire" et son oncle est écrivain.
Marquée par une enfance peu heureuse - sa mère sombre dans la folie, elle poursuit des études littéraires et devient chroniqueuse dans le journal familial dès 16 ans.
Peu avant, elle rencontre Suzanne Malherbe, dessinatrice et plasticienne, avec laquelle elle partagera sa vie et ses passions.
Après de études à la Sorbonne, elle collabore à diverses revues parisiennes. En 1917, elle change son nom pour Claude Cahun. Quelques années plutard, elle se rase la tête, et optera désormais pour des cheveux ras
Amie d'Henri Michaux, puis d'André Breton et de Robert Desnos, membre d'une troupe de théâtre, elle multiplie ses activités littéraires et militantes.
Aidée par la fidèle Suzanne, elle s'oriente en 1929 sur un travail photograpique innovant où elle se met en scène et se raconte.

Amie fidèle du groupe surréaliste, puis de Jacques Lacan -elle avait suivi des études de psychologie à la Sorbonne, elle rend régulièrement visite aux malades des services psychiatriques.
Discrète mais toujours présente, elle gardera toute sa vie des liens amicaux avec les surréalistes.
En 1937, elle s'installe à Jersey, avec Suzanne où elle vivra jusqu'à sa mort. Résistante passionnée, elle est arrêtée en 1944 par les allemands. Elle échappe à la condamnation à mort, mais restera en prison jusqu'en 1945. Sa maison est pillée, ses oeuvres son détruites, notamment ses photographies. Très éprouvée par son incarceration, ellle entreprend malgré sa santé fragile, la rédaction d'une autobiographie, et de ses aventures de résistante. Elle meurt en 1954.
"Il faut dire que j’étais naïve, insouciante, indépendante aussi … C’est à partir de 1937 que j’ai recommencé à remettre en question mon travail au milieu de tous ces artistes. J’ai perdu confiance en moi. Et là, pendant quinze ans, il y a eu un énorme trou noir, fait de désespérantes difficultés intérieures. Je n’ai émergé et recommencé à travailler qu’en 1954, où je me suis retrouvée dans la situation d’un « jeune artiste » qui avait tout à prouver, ce qui a été terriblement stimulant."

Malgré son image de "touche à tout", ou de "provocatrice", qui en ont fait une icone pour certains, Claude Cahun a construit une oeuvre autour des thèmes de l'autobiographie (préfigurant ainsi tout un courant d'art conceptuel, je pense notamment à la photographe-plasticienne Sophie Calle), l'androgyne, la métamorphose. Elle nous interroge sur ce que nous sommes, nos reflets divers, notre identité profonde.

Héroïnes
"Quand on renonce à créer, il ne reste plus qu'à détruire, car aucun vivant ne peut se tenir immobile sur la route du destin."
"l'art est moyen de " voyager à la proue de soi-même ".

« Je sentais que, par le soleil, j’étais androgyne, la lune, le Saint-Esprit, une gitane, une acrobate, Leonora Carrington
et une femme. Je vais être aussi, plus tard, Elisabeth d’Angleterre"

Sur la photographie :
Comment dire ? En elle, je me ressemble. Non pas : je me reconnais. Mais me ressemble. Il n'y a plus distinction, mais indistinction. Il n'y a plus différenciation, ni même différence, mais absorption. Mais plus - ou moins - que cela, il y a soustraction et non accumulation comme on pourrait le croire : soustraction l'une de l'autre, soustraction dont l'aboutissement est l'obnubilation, l'annulation de nous deux.
La photo s'offre comme gouffre.


Bibliographie
Les Héroïnes, Mercure, 1925.
Aveux non avenus, texte autobiographique illustré d'héliogravures de Marcel Moore, éditions du Carrefour, 1930.
Les Paris sont ouverts, José Corti, 1934.
"Prenez garde aux objets domestiques", cahiers d'art I, II, 1936.
"Dossier Claude Cahun "choix de textes réunis par François Leperlier, Pleine Marge 14, 1991.
Le Scrap-book, carnet de notes que Claude Cahun a tenu pendant la guerre (inédit).

Andy Goldsworthy, la sculpture naturelle.


" Je ne fais ni de l'Art pour l'Art, ni de l'Art contre l'Art. Je suis pour l'Art, mais pour l'art qui n'a rien à voir avec l'Art, car l'art a tout à voir avec la vie."

C'est l'un des pionniers du Land Art. Andy Goldsworthy, né le 26 juillet 1956 en Angleterre est un magicien. Après des études universitaires et une spécialisation dans les Beaux Arts, l'artiste va parcourir le monde.
Selon les principes du Land Art, il trouve son matériau dans la nature. Goldwworthy ne se déplace pas avec une valise d'outils. A peine a-t-il un canif dans sa poche. Il ramasse brindilles, feuilles, galets, glace; neige, pour composer d'étranges sculptures selon les élements.

Ainsi pour ses oeufs de glace ou de pierre, il avoue passer plusieurs semaine. Les pierres sont simplement empilées, sans mortier, sans colle. Il faut arriver à l'équilibre parfait. Ainsi, il peut se poser quelques mois dans un lieu, et y apposer son oeuvre, toujours en harmonie avec l'endroit, car il ne cherche pas à y apposer sa marque de fabrique, mais de continuer une oeuvre du temps.
« Mouvement, changement, lumière, croissance et altération sont l'âme de la nature, les énergies que j'essaie de faire passer à travers mon travail."

Le Land Art est un art éphémère. La glace fond, le vent disperse les brindilles, et les rivières transportent au gré de leur chemin les serpents de feuilles que l'artiste y a déposées. Ne reste alors que la photo pour fixer ce moment particulier, cette création originale et subtile, loin des musées, loin des théories complexes.

Ici, on ne peut que s'émouvoir sur la beauté et l'apparente simplicité.
Même si Andy Goldsworthy honore quelques commandes publiques, et fait parfois appel à une aide technique extérieure, il préfère sa campagne anglaise et quelques voyages en pleine nature.

Vous trouverez en librairie des très beaux livres illustrant le travail de cet artiste hors-normes.
A signaler aussi un documentaire passionnant "Rivers and tides" de Thomas Riedelsheimer, dont vous trouverez des extraits ici et .

Quelques autres imges par ici

Leccia, l'Ange de la vidéo


"Pour moi, il y a l’idée que l’œuvre peut encore se modifier, qu’elle a encore un peu de sa propre vie que des choses peuvent m’échapper. "

Projeté sur les murs d’un ancien haut fourneau, un homme déplie le bras, lentement. Simple me direz-vous. Mais l’homme a des allures d’ange et sa silhouette ralentie envahit l’espace, et mon écran de télévision. Je découvre Ange Leccia, un artiste vidéo et j’ai toujours en mémoire les images de ce corps au ralenti, christ et ange déchu (VIDEO IM, Kunsteverein, Cologne, Allemagne), monumental sur le mur de cette ancienne usine reconvertie en lieu d’art contemporain.

Plus tard j’ai découvert la Mer, œuvre achetée par la ville de Paris, toute aussi empreinte de poésie. Rares sont les artistes vidéos qui arrivent à m’accrocher, mais il faut bien le dire, les images sont grandioses. Une vague sans cesse projetée à la verticale, ralentie, qui monte et descend en boucle (à voir bien sur tel que l’artiste l’a conçue, pour écran géant), infinie, ralentissant le temps et lui donnant sa propre respiration.

Ange Leccia est né le 19 avril 1952 à Minerviu en Corse.

Après des études de peinture et de dessin, il se tourne vers la photo et la vidéo. Il commence à exposer dès 1980 en présentant des installations qu’il nomme « arrangements ». Reprenant l’idée du ready made de Marcel Duchamps, il dispose des objets, face à face ou cote à cote et présente des vidéos.

Il enchaîne très vite les expositions et connaît le succès assez vite. Pour prendre ses distances avec le monde artistique, Leccia voyage au Japon en 1990, avant de revenir en France où il expose au Musée d’Art moderne. Il est pensionnaire de la Villa Médicis en 1996, puis enseigne à l’Ecole des Beaux-Arts de Grenoble.

Par le biais de l’image filmée, Leccia veut inviter le spectateur à une réflexion sur la fragilité. A coté d’objets simples, la technologie numérique utilise des effets de ralentis, et les enregistrements successifs jusqu’à ce que l’image devienne illisible ou dissolue car largement pixellisée. . L’idée de l’immatériel (ici l’image étirée) dépassant le matériau (les objets présentés) n’est pas nouvelle, mais l’utilisation des procédés cinématographiques est poétique, fragile, se positionnant sur le terrain de l’affectif.

Leccia aime filmer les éléments naturels : nuages, mer, fumées qui deviennent informels, par des mouvements de flux et reflux, d’apparition et de disparition. Le temps devient insaisissable, étiré par le ralenti et par le procédé de « boucle » (la même image montée en continu). Les éléments ne sont plus de simples images mais des matières vivantes, des formes, dans un mouvement quasi-infini.

« Arranger, c’est trouver la relation, le point juste. Une fois cet emplacement découvert, la rencontre des objets, des éléments, devient autre chose, une oeuvre d’art. »

En 2003, Ange Leccia présente le mur, une installation regroupant photos contrastées entre noir et blanc formel et visages de femme dans des couleurs chaudes. La vidéo qui est projetée dure 20 mn et mêle images documentaires et de visions personnelles. Elle reprend son long métrage Azé - 1999 (le récit d’un terroriste parti se réfugier au Moyen-Orient). Elle est projetée sur un mur fait de parpaings. Leccia a voyagé dans les pays du Maghreb, en Palestine et en Syrie. Il mêle l’histoire des peuples dans des contextes politiques difficiles, des images pixellisée de mosquée, de foule, de soldats, de prisons blafardes. La bande son retrace la vie dans ce pays arabe imaginaire : bruits de klaxons ou de mitraillettes. Seuls les visages des femmes rayonnent comme un espoir de paix et forment un contrepoint esthétique à un montage très rythmé. Seul constante, le mur qui sert d’horizon. On pense bien sur au mur construit entre Israël et la Palestine, au mur de Berlin. « L’engagement politique de l’artiste est de montrer que tous les hommes s’aiment, de démontrer la richesse de la philosophie, la force de l’amour. Mon propre engagement est d’être un artiste qui s’imprègne du monde qui l’entoure et donne un regard sur la société.

Ange Leccia travaille également sur des œuvres plus abstraites, comme la série des Introspections. Il propose un temps autre, un temps de méditation, un peu comme dans la Mer.

"Cette attitude d’intériorité est une philosophie de l’anti-consommation."


Reconnu dans le monde entier, Ange Lecchia dirige le Pavillon, atelier expérimental au Palais de Tokyo à Paris. Actuellement, il présente une installation au Musée Bourdelle à Paris (jusqu’au 30 août 2009). Un film vidéo de 15 minutes, en noir et blanc avec des images colorisées est projeté. Leccia, une fois de plus, en scrutant les sculptures de Bourdelle, dévoile une immatérialité, révèle les lignes et semble « animer » les corps de pierre.

Dans ce dialogue avec la sculpture de Bourdelle, puissante et souvent monumentale, la caméra scrute les surfaces, insiste sur les détails. Comme les corps inertes dévoilent, sous l’effet d’une dramaturgie de la lumière, leur qualité charnelle, les figures s’estompent jusqu’à sembler immatérielles. La présence intermittente d’un personnage féminin, tout à la fois modèle et guide, vient souligner les contrastes entre tension et repos, passion et sérénité que dégagent les oeuvres du sculpteur.

Ange Leccia prépare également un autre long métrage.

un portrait d’Ange Leccia : http://www.vodeo.tv/18-22-2965-ange-leccia.html

son site ou vous pourrez retrouver les vidéos La mer, et Fuméees http://www.clinicaaesthetica.com/leccia/leccia.html